ingrid 30 ans IVG médicamenteuse

Mes blessures sont si profondes qu’elles sont invisibles pour mon mari et cachées à mes proches. J’ai 30 ans, mariée, 2 enfants. J’étais contre l’avortement. Mais il y a 2 semaines j’ai avorté. Avec un second enfant en bas âge, mon mari a tout de suite suggéré l’avortement lorsque le fameux test a indiqué deux barres. Au départ je pensais qu’il plaisantait. Je suis une femme mariée notre foyer est stable, nous avons un toit et un travail,  aussi pourquoi songerais-je à avorter? …Acte qu’avant je jugeai de barbare, et qu’après l’avoir commis je juge d’inhumain.

La décision était prise… par mon mari. Et tout en le refusant je me cachais derrière lui pour me dire que « oui, cela va bousiller notre couple la venue d’un troisième enfant dont il faudra prendre soin en terme de temps et d’argent ». Me dire que « oui, c’est trop tôt et cela va affecter notre aîné qui lui n’a que 2 ans et demi ». Mais dans tout cela, je ne pouvais m’y résoudre. Entre la première fois où je suis passée au centre de planification  et le jour de l’avortement, il s’est écoulé 9 jours. 9 jours où j’ai retourné un million de fois la situation dans ma tête pour entrevoir une issue positive à cela. 9 jours où je n’arrêtais pas de demander à mon mari: “tu es sûr?”. 9 jours où je m’informais sur Internet « où en est cet être par rapport à son évolution ? » pour me sentir moins coupable si jamais il n’avait pas encore de vie réelle, de début de formation de tête et tout. Je ne cessais d’ailleurs de me demander à partir de quand un être s’appelle une vie. 9 jours où pourtant il ne cessait d’évoluer en moi et il me l’a bien fait savoir: nausées matinales sont survenues. Mon mari, lui, ne voyait pas ces signes. Après avoir décidé d’avorter, il est passé à autre chose. Mais moi, je sentais cet être. Et j’étais déjà coupable de penser à mettre un terme à son existence. Moi qui me disais déjà que c’est sûrement une fille. Après avoir eu deux garçons. Et quand on n’est pas encore décidée, je ne vous dis pas ô combien ça arrache le cœur de faire cette analyse sanguine et cette échographie de datation. …

Je me suis rendue à l’échographie avec mon bébé de quelques mois puisque je ne pouvais le confier à personne ce jour-là. Je me sentais monstrueuse. Ne l’étais-je pas. J’avais espéré y  puiser la force et le courage nécessaire en le regardant pour affronter mon mari et tous les problèmes qui vont suivre, mais au contraire, j’y ai trouvé la phrase qui  confortait une petite partie de moi: “il ne manifeste aucun battement”. Je me suis dit « ok, je ne vais pas le tuer alors ». On ne tue pas quelque chose qui ne vit pas. Mais sur le chemin vers la maison, je  réalisai en pleurs de l’intérieur que si c’était  un enfant qu’on allait garder, je devrais être paniquée qu’il ne présente encore aucun battement à ce stade là… alors que selon ce que j’ai lu il son cœurs battait déjà. Le jour de l’avortement on m’a fait signer une décharge que j’ai pris la peine de lire. C’est là que je m’informe qu’il y a des risques d’échec et qu’on pourrait devoir l’aspirer.

Déjà la voie médicamenteuse c’est inadmissible mais l’aspiration je sais que je ne le ferai jamais. Alors j’ai posé des questions mais j’avais l’impression que tout ce que mon interlocutrice voulait c’est que j’abrège. Et d’un ton indifférent, elle me répondait, me demandait si j’avais envie de discuter avec son collègue, si je voulais reporter alors qu’à ce moment là je savais que je ne pouvais plus reporter, le temps était contre moi.

Mais il aurait juste fallu que  d’un ton plus rassurant et compatissant,  elle me dissuade de faire cet acte que visiblement je n’avais pas du tout envie de faire. Quand la dame a sorti “la pilule stoppeuse”, ma tête a dit non tu ne feras pas ça. J’ai appelé mon mari une dernière fois, toujours cette même question: «Tu es sûr?”. Et après avoir raccroché j’ai avalé la pilule comme avalé un poison, sans état d’âme, sans réfléchir et en espérant mourir dans la minute qui suit. On m’a dit qu’après la prise des “expulseuses”, cela sortira. J’ai eu des saignements et des membranes qui se libéraient de mon corps après les “stoppeuses”. Je ne m’y attendais pas  cela m’a surpris pendant la nuit suite à des contractions. Comme un accouchement. Je pleurais si fort et implorais mon bébé “je t’en prie ne t’en va pas”… “Mais qu’est-ce que j’ai fait!”. On m’a aussi dit que j’aurai un peu mal. Comme des règles. Jusqu’à présent,  je me demande si on m’a délibérément menti pour que je ne revienne pas sur cette décision. Jusqu’à présent,  je me demande pourquoi ne m’a t-on pas proposé d’autres issues quand je présentais mes raisons pour  cette IVG. Je l’ai pourtant dit comme un appel au secours: “je ne sais pas quoi faire », J’aurai juste voulu que tout cela n’ait jamais existé.

Pourquoi accepte-t-on cette option d’IVG comme si l’on doit passer par là à chaque angoisse de grossesse ? À chaque doute de ne pas y arriver ? Avorter est certes un droit. Mais souvent, on ne nous communique pas toutes les dissuasions qui doivent être manifestées face à cette option. On ne nous accompagne pas assez psychologiquement pour nous faire réaliser qu’on a ce choix mais ce n’est pas parce qu’on peut le faire, qu’on doit le faire. On ne nous dit pas assez qu’il est possible d’avoir d’autres alternatives. Parce que finalement, on cherche des réponses  à nos craintes suite à une grossesse non désirée ou encore précoce et on pense se rendre au bon endroit. Mais non! Pourquoi ne pas conduire les femmes à une réflexion et proposer une autre voie possible ? Des aides pour qu’elle puisse gérer la grossesse et élever son enfant ? Avorter est un droit mais on ne nous informe pas et les organismes qui sont là pour nous « accompagner » minimisent tellement notre choc émotionnel, nos remords et nos angoisses. Beaucoup de femmes s’y lancent sans savoir dans quoi elles vont s’embarquer… elles ont le droit d’être informées que c’est une fausse couche provoquée. Ou plutôt un accouchement précoce. Cela fait mal. Atrocement. Pour ma part cela fait 11 jours que je saigne et j’ai encore des caillots qui me font mal à sortir. Tout d’un coup, comme une revanche, il me vient l’idée, et même l’envie d’être à nouveau enceinte pour oublier, ou plutôt pour effacer. Oui, comme si celui que j’ai expulsé s’incarnerait à nouveau dans mon ventre à travers un nouvel embryon. Mauvaise idée. Je reviendrai cette semaine au centre  pour savoir si l’expulsion a été effective. Et si ?… Non, on ne nous oriente pas, on nous accompagne dans cette “volonté involontaire” que ni le temps, ni les autres grossesses à venir ne sauront réparer.

 S’il vous plaît, avant de procéder à l’IVG, à défaut qu’on vous propose d’autres solutions et de l’aide pour vous et votre futur bébé, demandez les autres issues. Ces bébés en devenir ne demandent qu’à illuminer notre vie. Ne vous cachez pas derrière la décision de votre conjoint,… Si vous sentez que vous voulez ce bébé, armez-vous des meilleurs conseils et soutiens pour pouvoir l’assumer. Ne fléchissez pas face à vos craintes de ne pas y arriver. Cherchez juste de l’aide.